Bon, oui, je sais, ça en fait du monde pour un simple boeuf bourguignon. Mais c'est sans doute aussi pour cela que j'aime tant faire la cuisine. Parce que c'est un univers infini de traditions qui se perpétuent et d'idées nouvelles qui viennent s'y frotter. Et parce que souvent ce sont des rencontres humaines qui sont le vecteur de nos réalisations culinaires, qu'elles soient en chair et en os, à la lecture d'un auteur culinaire ou bien matérialisées par un coup de téléphone à une amie lointaine. Voici donc un peu plus de détails sur les protagonistes de mon histoire de boeuf bourguignon.
Julie & Julia:
Il y a quelques temps, je suis allée voir au cinéma Julie & Julia avec ma copine bloggeuse Aude. Julie, jeune new-yorkaise, auteure d'un roman non-publié et non terminé, en mal de reconnaissance, décide de se lancer un défi: elle réalisera en un an toutes les recettes de l'ouvrage américain de référence sur la cuisine française, écrit par l'exubérante Julia Child, et fera le récit de ses aventures culinaires quotidiennement dans un blog, The Julie/Julia Project. Le film nous plonge dans l'aventure de Julie, ses joies et ses peines de bloggeuse et de cuisinière (Julie, tu me parles?), et celle de Julia, qui tombe amoureuse de la France, de sa cuisine et fait le projet fou de la résumer dans un ouvrage. Ces deux histoires m'ont parlé à moi bien sûr, et c'est pour ça que j'ai passé un très bon moment. Mais c'est également pendant le film que m'est venue l'envie de cuisiner un boeuf bourguignon. Oui, voyez-vous, Julie réalise dans le film celui de Julia, et dans un process totalement conscient d'identification, j'ai décidé d'en faire un moi aussi, à la première occasion.
Comme nous recevions nos amis Alexis et Laurence le week-end dernier, et que leur coup de fourchette est généreux, c'était l'occasion idéale, et je suis partie sur le web à la recherche de la recette de boeuf bourguignon de Julia Child. Ca n'a pas été long, et le meilleur endroit pour la trouver était bien sûr le blog de Julie, à la date du 11 décembre 2002. Je me suis délectée du billet de Julie. Pas de liste d'ingrédients, trucs et astuces ou ni de petit 1, petit 2, petit 3, mais du texte, drôle, qui explique le déroulement de la recette, mélangé à ses impressions, ses émotions inspirées de la cuisine de Julia. En bref, c'est plus un témoignage qu'un blog de cuisine. Mais la recette était là, j'avais ce qu'il me fallait.
Esther et moi:
En toute logique, un boeuf bourguignon se cuisine avec un vin de Bourgogne. Mais voyez-vous, nous ne sommes pas très connaisseurs des vins de Bourgogne, et nous n'en avons pas à la maison. Je ne voulais pas utiliser une piquette ou un vin trop cher, ce qui ne m'encourageait dans la direction de la Bourgogne. En revanche, j'avais sous la main un bon Languedoc. Et comme je n'étais pas tout à fait sûre de moi, j'ai pris mon téléphone et appelé mon amie Esther, dont la passion communicative pour la cuisine n'est certainement pas pour rien dans la mienne. Autre détail non-négligeable, je ne connais personne qui maitrise aussi bien les plats en sauce et la cuisine au vin. Oui, m'a confirmé mon amie Esther, le Languedoc va donner un bon goût sucré à la viande, ce sera très bon. Ou alors, a-t'elle suggéré, prends un Pinot Noir d'Alsace, qui pour un bon rapport qualité/prix donnera au plat la même légèreté et une saveur approchante à celle qu'un vin de Bourgogne apporterait.
Bien lancées, nous avons ensuite discuté des sujets divers tels que "Faut-il ou non singer la viande?" et "N'est-ce pas une chance merveilleuse que d'être inscrite au prochain cours de Fumiko Kono à l'école de cuisine Ducasse?". A la deuxième question, la réponse est oui, cent fois oui -enfin, normalement*. La première question, elle, suscita un débat. En effet, si fariner la viande avant d'ajouter le bouillon (et le vin dans le cas précis) donne de la consistance et du liant à la sauce ainsi qu'un petit goût délicieux si on fait torréfier cette farine sur la viande, cela peut alourdir le plat. Qui n'est déjà, bien sûr, pas une merveille de la diététique moderne. J'avais finalement l'intention d'avoir la main légère sur la farine, mais acte manqué ou pas, j'ai oublié, et suivi le conseil d'Esther, qui, elle, préfère éviter. Je n'ai pas regretté, la sauce était légèrement hétérogène, mais cela n'a pas le moins du monde entamé notre plaisir à la dégustation et le plat était plus léger et digeste comme ça. Pour le vin, je suis restée sur le Languedoc. Il s'agissait d'un modeste mais très bon Côteaux du Languedoc rouge, Château l'Hospitalet La Réserve 2007 et c'était parfait. Nous avons bu un Côtes du Rhône, Saint-Joseph les Serines 2003 et tout le monde a bien aimé l'accord.
Le moment mémorable de la réalisation de cette recette fut le brunissage de la viande. L'odeur qui se dégageait de la cocotte m'a paru particulièrement délicieuse. Nous nous sommes régalés à quatre et il en reste une bonne portion dans le congélateur pour un soir de blues culinaire.
* Le cours a été annulé et à la suite d'un imbroglio (mes e-mails arrivaient dans la boite de spams de l'école de cuisine Ducasse) je ne suis pas inscrite au cours de remplacement. C'est peu dire que je suis déçue.
Boeuf Bourguignon adaptée de la recette de Julie Powell, elle-même adaptée de la recette de Julia Child dans Mastering the Art of French Cooking. Pour 6 personnes.
Ingrédients:
- 1,7 kg de jarret de boeuf
- 2 oignons
- 2 carottes
- 1 belle tranche de poitrine
- 500 ml de vin rouge
- 500 ml à 1 litre de bouillon de boeuf
- 2 càs de concentré de tomate
- 1 ou 2 feuilles de laurier
- du thym frais (facultatif)
- plusieurs gousses d'ail (j'ai dû en mettre 6 ou 7)
- un peu de farine si vous souhaitez "singer" la viande
- de l'huile d'olive
- du sel, du poivre
Bien sûr, il vaut mieux préparer ce plat la veille et le faire réchauffer le jour même à petit feu. J'ai servi ce plat avec des pâtes fraiches "Gigli", achetées aux Halles de Lyon et dont la forme tarabiscotée a bien accroché la sauce. Pour singer la viande, modifier la recette comme ceci: préchauffer le four à 230°C au lieu de 160° C. A la fin de l'étape 2, saupoudrer la viande avec la farine et remuer pour la répartir le plus uniformément possible, puis enfourner pendant 4-5 minutes pour torréfier la farine. Baisser la température du four à 160°C, sortir la cocotte, remuer à nouveau et reprendre à l'étape 3.
1/ Préchauffer le four à 160°C. Découper la tranche de poitrine en lardons. Eplucher et détailler les carottes en rondelles. Eplucher et émincer les oignons.
2/ Faire chauffer un peu d'huile d'olive dans un cocotte et faire dorer les lardons. Sortir les lardons de la cocotte et les réserver. Faire dorer la viande de tous côtés dans la même cocotte. Procéder petit à petit, et ajouter un peu d'huile d'olive si la viande accroche trop. Procéder petit à petit, et réserver les morceaux hors de la cocotte au fur et à mesure qu'ils sont bien dorés. Faire revenir les oignons et carottes dans la cocotte. Au bout de quelques minutes remettre les lardons et la viande dans la cocotte. Saler et poivrer.
3/ Ajouter dans la cocotte les gousses d'ail, les feuilles de laurier et de thym, et le concentré de tomate. Verser le vin, et couvrir à hauteur avec le bouillon.
4/ Enfourner pendant environ 3 heures, plus ou moins selon la consistance souhaitée de la sauce.
Avec un Saint Joseph "Les Serines" de chez CUILLERON, vous avez du vous régaler. C'est un Saint Joseph très puissant sur un millésime atypique (année de la canicule). Le marriage avec ce vin a du être délicieux.
Rédigé par : Rémi | 12 octobre 2009 à 10:04
j'adore ce plat, mais as tu fait brûler le vin ? pour toutes les sauces au vin il me semble que c'est mieux
Rédigé par : mamie caillou | 12 octobre 2009 à 12:57
J'aime aussi, mais évidemment, après qu'on soit allée voir le film avec ma fille de 6 ans, elle me réclame cette recette (et la dernière du film !)
Rédigé par : Tiuscha | 12 octobre 2009 à 17:09
"J'ai servi ce plat avec des pâtes fraiches "Gigli", achetées aux Halles de Lyon"
Pour tes pates, à moins d'aimer les payer 30€ le kilo pour pas grand chose (200 balles en traduisant en francs non constant, ca fait drole pour des pates), prefere plutot le petit italien sur le marché quai saint antoine (la deuxieme partie, entre le pont pieton et bellecour)
Rédigé par : sborgnanera | 12 octobre 2009 à 18:01
Rémi! Ravie de te lire ici. C'était effectivement très réussi, on peut remercier Grégoire.
Mamie Caillou - Je fais attention pour certains plats. Par exemple, je fais évaporer l'alcool du vin blanc avant de faire cuire des moules. Mais dans le cas des plats en sauce, comme ça, je n'ai pas le réflexe. Je suis très intéressée par ta manière de procéder.
Tiuscha - Tu as du passer un bon moment avec ta fille!
Sborgnanera - C'est vrai qu'aux halles certains produits sont plus chers qu'ailleurs pour une qualité par toujours supérieure.Je ne me souviens pas exactement du prix que j'ai payées les pâtes, mais ce n'était certainement pas 30 euros le kilo, et les autres choses que j'ai achetées chez ce commerçant (comme du parmesan à la coupe) étaient pour le coup d'un rapport qualité/prix défiant toute concurrence, pour un service absolument adorable. Quoi qu'il en soit, nous y avons passé un très bon moment avec nos amis en visite à Lyon. En tous cas, merci pour l'adresse du marché saint antoine.
Rédigé par : flo | 12 octobre 2009 à 21:58
Flo tu me fais mousser! N'en jetez plus... Bien vu l'hospitalet, je te conseille le 2008 médaille d'or à mâcon chez monoprix au même prix que le 2007.
Si t'es sage (et si tu la veux!) je te donnerai la meilleure recette de cheesecake de la terre pour mériter tous ces compliments.
Bises
Rédigé par : esther | 13 octobre 2009 à 14:16
T'as bien raison! Le bourguignon c'est une affaire d'amour (chez moi c'est la daube, mais pour le coup c'est pareil;)
Rédigé par : Cocotte | 13 octobre 2009 à 16:31
Merci Julie, Julia, Esther et toi ! moi, je me suis régalée égoïstement avec mon doggy-bag de bourguignon ! j'ai eu le chic pour passer au bon moment !!!
Esther, si je te dis tout le bien que Flo m'a dit de toi, j'aurai la recette du meilleur cheesecake de la terre ?
Rédigé par : aude | 22 octobre 2009 à 18:30
Tout se négocie... mais là il va vraiment falloir être très convaincante!
Rédigé par : esther | 23 octobre 2009 à 09:34
Ca doit être le prénom, mais je suis d'accord avec Esther pour ne pas singer la viande ;-)
Rédigé par : Ester | 21 novembre 2009 à 23:18